Il y a cette meuf près des cinés et son vieux vélo, son panier en osier plein de fleurs en plastique, son guidon recouvert de fleurs fluos en plastique. Il y a ce mec sur le boulevard et sa Toyota Celica de 1995, ses jantes larges et ses néons mauves fixés aux bas de caisse rabaissés.

Il se souvient de l’annonce de la mort de John Lennon. Bernard lui apprenait le b.a-ba du métier de cracheur de feu avec du white spirit sur la pelouse de la maison de Limal. Lui, il n’a pas tout de suite pigé le truc. Alors il a avalé de travers 2 ou 3 fois. Le white spirit, c’est dégueu.
Il y avait cet hôpital psychiatrique près de Limal où les ados sautaient par la fenêtre du premier étage pour atterrir dans le jardin des voisins. Lui aussi. Il y avait les poursuites sur le viaduc du boulevard Reyers. Les autres faisaient la course à 2 heures du mat. Lui aussi. Il avait une R4 bleu ciel. Bernard était plus rapide avec sa R10 vert bouteille. C’était un autre Bernard.
Il se souvient de l’annonce de la mort de Michael Jackson. Il n’en avait rien à foutre. Il se souvient de Joël Robert et de ses CZ tchèques et de ses Suzuki jaunes, de la sortie de Odelay de Beck, d’avoir écouté au moins 254 fois le single Where is my mind des Pixies, de ses premières fois avec Clash, Suicide, Wim Wenders, Jim Harrison, Sophie, Michèle et Marinette. Il ne se souvient pas toujours de ses premières fois. Il se souvient de la mort de Bernard Jarbinet. C’était en deuxième primaire à Gembloux. C’était la première fois qu’il entendait le mot méningite. C’était son premier enterrement. Il se souvient d’un petit cercueil blanc. Brillant. Ca devait être l’été.