vendredi 16 octobre 2015, entre 13 et 22 heures

Chronologie des lieux
Le chemin vert, rue des Clarisses
Le point chaud, rue de la Casquette
La pharmacie, rue de l’Université
L’arrêt du 24, au pied du pont Maghin

Au chemin vert, une vieille fielleuse boitillante qui reproche à des cyclistes leur vitesse excessive sur le RAVeL. Elle prône, rageuse et tremblotante, une limitation de vitesse. Un de ses amis piétons a valsé dans le ravin sur le ravel, bousculé par un cycliste. Six mois d’hosto. Elle propose de leur filer l’adresse de l’ami gravement raviné histoire de prouver sa bonne foi. Au chemin vert, quelques minutes plus tard, un mec de quarante balais qui ne comprend pas le prix des carottes bios alors que le coût de production est beaucoup plus élevé pour Mosanto. Avec les pesticides, la main d’oeuvre, les avions qui pulvérisent. Alors que le bio, ça existe depuis Adam et Ève. Qu’il suffit de regarder pousser, et de faire bosser les gens au chômage, les gens au cpas, les gens en taule.

Au Point chaud, la vendeuse qui demande à un petit monsieur si « Les vacances, ça a été? ». Lui, il répond que c’était émouvant. La vendeuse laisse le silence s’installer. Elle s’abstient d’un pourquoi. Puis, elle dit « Vous logiez dans la famille ? ». Il répond « Non ! »
– Pourquoi ?
– C’est moins cher à l’hôtel .

Dans la pharmacie, un vieux à canne qui se plaint de sa nouvelle cataracte. Qu’il va porter plainte contre le généraliste, l’ophtalmo, la ville, la province, le monde entier. La pharmacienne soupire en souriant. Le pharmacien soupire en levant les yeux au ciel.

Au bas du pont Maghin, la femme au turban bleu – d’un bleu vraiment bleu – qui attend le 24. La pluie froide ne l’atteint pas. Tranquille. Lui, un peu plus tôt, il a souri à ses questions douces, ses yeux bégayant légèrement, parfois. La femme au turban bleu n’a pas besoin de parapluie. Tranquille.

Dehors, à dire vrai, vous me faites chier !

Je trouve ça bizarre, pour ne pas dire malsain, les « gens tout comme moi » qui gueulent contre la position européenne vis à vis de la Grèce. Comme s’ils découvraient là-maintenant que Juncker a tout du facho-mafieux, que Michel est un tenant de la droite fort-fort libérale, que leur t-shirt est façonné par des gosses à la peau sombre, qu’il faut 10 000 litres d’eau pour fabriquer un jean. Aujourd’hui, et ça date pas d’hier, je me sens autant en marge de ces gens-comme-moi que des chantres-esclavagistes du libéralisme sauvage. Je ne fais pas partie de votre monde où naïveté et cynisme se confondent. Vraiment.

Continuons à parler de la Grèce, puisque ça obsède votre bonne conscience de missionnaire de la bien pensance. Prenez-vous vraiment Tsipras pour un gros con ? Parce que, là, faut être clair: VOUS  PRENEZ TSIPRAS POUR UN GROS CON. Croyez-vous que, lorsque Siriza est arrivé au pouvoir, il n’avait pas prévu ce cas de figure ? Croyez-vous vraiment que Tsirpas ignorait qu’il aurait les pontes du FMI qui l’attendraient au pied du Parthénon ?  Mais, VOUS, les gens-comme-moi, vous poussez vos cris d’orfraie. BEURK !  Les gens-comme-moi, votre révolte n’est jamais qu’un comportement d’impérialisme de la bonne conscience. Vous croyez à une version fictionnelle de la démocratie qui n’est jamais que votre grille d’analyse d’occidental BLANC . Vous ne vous êtes même pas aperçu qu’il y a un bon bout de temps  que le mot « démocratie » ne veut plus rien dire. Vous n’imaginez même pas que les grecs, eux, veulent prendre leur destin en main. Les croyez-vous incapables ?  Voulez-vous les protéger ? Ce n’est jamais qu’une attitude de missionnaire. Alors, la vraie question pour les gens-comme-moi, c’est:
Que faire ?

Et puis, tant qu’on y est, un autre point. La société occidentale est en train de mourir de PEUR. Une société de flippés avec des gens-comme-moi qui ont cru que tout les acquis étaient intangibles, pour des siècles et des siècles.  Des gens qui ne construisent des philosophies que fondées sur leur propres émotions. Autre forme d’impérialisme, de colonialisme. Après l’impérialisme de la pensée, l’impérialisme de l’Émotion.
Et vous qui découvrez que le monde de dehors n’est pas juste ! HAHA ! Ah oui, j’en ai aussi un peu marre des gens-comme-moi qui imputent tous leurs maux au Pouvoir, qui n’y sont jamais pour rien comme s’ils défilaient en toute transparence dans leur propre vie. Pour ceux-là, je ne vois que le suicide comme solution vivable.

Que faire ?

(petite lecture : « Contre les élections » de David Van Reybrouck)

Renault Trafic, direction Bandiagara, le pays Dogon (petites suites maliennes / 2015)

Sevare. Dernier tronçon avant la falaise de Bandiagara, le plus court, le plus hard (c’est ce que JM et Soumi prétendent). Il y a un Renault Trafic tôlé « Old generation ». Le proprio a disqué deux hublots de chaque côté pour provoquer un semblant de courant … Continuer la lecture de Renault Trafic, direction Bandiagara, le pays Dogon (petites suites maliennes / 2015)